L’histoire - Le lac du Bourget, une référence pour l’étude de l’âge du Bronze

Localisation des gisements sous-lacustres
Carte de localisation des gisements sous-lacustres reconnus dans le lac du Bourget (en noir les sites néolithiques, en gris les sites de l’âge du Bronze, en blanc les autres périodes)

Le lac du Bourget est une référence incontournable pour l’âge du Bronze. Cette renommée a été établie dès le milieu du XIX siècle. Mais, après des récoltes aussi fructueuses que désordonnées, il faudra attendre 1950 et les développements de la plongée en scaphandre autonome pour que les premières observations directes soient réalisées. Ainsi, c’est sur les stations de Châtillon et de Grésine que le précurseur Raymond Laurent a mis au point certaines des méthodes encore utilisées aujourd’hui. Récemment, la connaissance de terrain des stations s’est affinée avec la prospection de la totalité des rives et un programme de sondages systématiques, actuellement en cours. De plus, le recours à la datation par la dendrochronologie permet de disposer de calages très précis dans le temps.

Plongeur en cours de fouille, Le Saut, Tresserve

Vers 1350 avant J.-C.

Si des indices de fréquentation des rives ont été identifiés pour le tout début du Bronze final, ce n’est qu’à la fin du IIe millénaire que débutent vraiment les installations humaines, profitant de la baisse du niveau du lac. Elles se marquent tout d’abord par des aménagements dont les fonctions restent à déterminer comme, par exemple, l’alignement de groupes de pieux topographié dans la baie de Conjux et daté de 1084 av. J.-C. Dans le même secteur a été repéré un habitat dont le matériel céramique se rapporte à la phase moyenne du Bronze final. Des pieux associés ont fourni la date de 1054 av. J.-C.
Durant le siècle qui suit, des dates éparses témoignent de la présence humaine, mais les éléments manquent encore pour la caractériser.

910 av. J.-C.

Le début de la phase principale d’occupation des rives du lac s’inscrit entièrement dans la phase récente du Bronze final, le « bel âge du Bronze » des anciens auteurs. Six grands villages couvrant de 8 à 12000 m2 sont alors occupés simultanément. Les récents sondages ont montré que, contrairement à ce qui était admis, l’état de conservation est très bon pour la plupart d’entre eux. Un abondant matériel céramique a été recueilli, non pas en désordre et seulement en surface comme au siècle dernier, mais dans des séquences stratifiées, épaisses de 30 à 60 cm, en association avec des bois couchés permettant des datations. D’autre part, la nature des sédiments a permis la conservation d’objets en matières périssables, inconnus sur les sites terrestres : cordages, sparterie, vannerie et pour le bois, coupe, tête de maillet, poinçons, manches d’outils ainsi que le montant latéral d’un brancard long de 2,85 m.

813 av. J.-C.

C’est la date la plus récente identifiée à ce jour. Les causes de l’abandon des rivages ne sont pas encore clairement déterminées. Il est probable que se conjuguent, en relation avec une dégradation du climat, la remontée du niveau du lac et les faibles rendement d’un terroir surexploité.

Les bouleversements sociaux dus à la mise en place des économies de l’âge du Fer sont également à prendre en compte. Les occupations du Bronze final du lac du Bourget s’inscrivent dans un phénomène englobant l’ensemble des Alpes du Nord mais elles possèdent leur originalité avec, en particulier, une plus longue occupation des rives. Surtout leurs vestiges sont remarquables par leur état de conservation et les potentialités qu’ils offrent pour la compréhension des occupations humaines et de leurs liens avec le cadre naturel. Mais ce patrimoine archéologique est extrêmement fragile et vulnérable aux aménagements d’infrastructures littorales. Une notion de développement durable doit lui être appliquée afin que puissent être transmis ces exceptionnels témoins d’une période de dépendance étroite des hommes avec le lac.

Yves Billaud

Posté le 20 mai 2013 par administrateur